Essai: Mazda MX 30: l’électrique vu d’un autre oeil par Dimitri Urbain

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Parmi les constructeurs généralistes, Mazda occupe une place particulière. Le constructeur japonais se distingue toujours par une approche originale et décalée pour apporter des solutions différentes. La dernière MX30 ne faillit bien sûr pas à la tradition en déboulant sur le marché des crossover électriques. (Texte: Dimitri Urbain; Photos: Paul-Edouard Urbain, Mazda Europe)

Vision unique

Comme ses concurrents, Mazda a autant besoin d’un véhicule électrique pour répondre aux normes d’émission de plus en plus draconiennes que pour satisfaire une clientèle toujours plus sensible à l’écologie. Néanmoins, la marque ne semble pas totalement convaincue des bienfaits de l’électricité, à la différence de nombreux autres constructeurs. Certes, Mazda ne nie pas le réchauffement climatique et l’impact de l’activité humaine sur ce dernier, bien au contraire. Soucieux de l’empreinte environnementale du véhicule électrique, le constructeur nippon estime que son impact doit être mesuré sur l’ensemble de sa vie, depuis sa fabrication jusqu’à son recyclage. Dans cette perspective, l’utilisation d’une batterie lithium-ion de grande capacité, lourde, aura évidemment des conséquences indéniables. Notamment la production d’une quantité importante de CO2, lors de sa fabrication. Mazda a donc choisi de limiter la taille (et le poids !) de la batterie du MX30 et, ce faisant, son autonomie.

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Mazda fait appel aux valeurs traditionnelles de la culture japonaise dans son design, baptisé « Kodo ». A la fois classique et moderne, il se décline très bien sur l’ensemble de la gamme et confère une belle harmonie au MX30.

Ce choix est-il judicieux, face à la concurrence? L’autonomie mixte annoncée est de 200 km et même 262 km en ville, avec une régénération maximale. Notre modèle d’essai est équipé d’un moteur électrique synchrone AC baptisé « e-Skyactiv » qui alimente une batterie lithium-ion de 35,5 kWh. La puissance maximale est de 143 ch ou 105 kW pour un couple maximum de 265 Nm. La vitesse est limitée électroniquement à 140 km/h et le 0 à 100 km/h demande 9,7 sec. En finition haut de gamme Skycruise, il est annoncé à 37.790 €, tout compris. La gamme débute à 33.490 €, hors primes et remises, bien entendu. Face à quelle concurrence? L’Opel Mokka-e 50 kWh offre également 136 ch et 322 km d’autonomie, ses tarifs variant entre 36.200 et 41.300 €. Le Peugeot e-2008 propose la même puissance et 310 km d’autonomie, pour des tarifs compris entre 37.350 et 43.700 €; le DS3 Crossback E-Tense, 136 ch lui aussi (base commune avec le 2008 et le Mokka) offre 320 km d’autonomie pour des prix se situant entre 38.400 et 44.200 €. Voilà pour ce qui est des SUVs et Crossovers, le MX30 étant bien placé côté tarifs et équipements. Reste son autonomie, largement en-deçà de celles de ses concurrents directs. Faut-il aller chercher des concurrentes du côté des citadines, alors? La Peugeot e-208 GT Pack est à 37.700 €, propose 136 ch et annonce 340 km d’autonomie; la Nissan Leaf avec batterie de 40 kWh débute à 36.540 € et annonce 270 km d’autonomie; la Renault Zoe 136 ch débute à 35.600 € et propose 386 km d’autonomie; l’Opel Corsa-e Auto e-GS Line est à 33.895€ et son autonomie est de 337 km; la Mini Cooper SE L est à 38.400 € et son autonomie annoncée à 235 km. Reste la Honda e de base, en 136 ch, qui est à 34.500 € et la version 154 ch à 37.500 €. Toutes deux annoncent 220 km d’autonomie. Dans cette catégorie aussi, le MX30 ferme la marche pour l’autonomie; il va donc devoir séduire autrement…

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Les portes arrière antagonistes sont une réminiscence de la RX8, le dernier modèle à moteur rotatif produit en série par le constructeur d’Hiroshima. L’absence de montant central facilite l’accès aux places arrière.

Design empreint de valeurs traditionnelles

Dans le jargon de la marque, « MX » correspond à « Mazda Experimental ». La MX5 vient immédiatement en tête mais souvenons-nous également des MX3, ces petits coupés au style bio-design équipés d’un V6 de 1800 cm³ ou encore de la MX6, un coupé quatre places. Dans le cas de la MX30, outre ce rappel appuyé à des modèles sportifs, il y a également un gros clin d’œil à la RX 8 (pour « Rotary Experimental »), dernier modèle de la marque équipé d’un moteur rotatif produit en série et lui aussi équipé de portes antagonistes à l’arrière. Extérieurement, nous retrouvons les grandes lignes du style maison, baptisé « Kodo », très épuré. Soulignons que parmi les constructeurs japonais, Mazda est l’un des seuls (si pas l’unique…) à proposer une cohésion stylistique sur l’ensemble de sa gamme. D’un modèle à l’autre les choses évoluent mais les éléments de bases et l’harmonie générale sont toujours bien présents. Dans le cas du MX30, il s’agit également du concept « Human Modern », centré sur l’humain, avec des valeurs très japonaises et des éléments de design censés favoriser l’harmonie et la sérénité… pas moins! Le choix des teintes extérieures (trois sur notre modèle d’essai!) est conçu pour renforcer cette harmonie.

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L’espace sous le capot devrait bientôt permettre d’y installer un range extender… rotatif! Selon Mazda, cette solution est plus écologique que d’augmenter la capacité (et donc le poids et le prix) de la batterie.

Alors que certains constructeurs choisissent délibérément un aspect différent, des proportions uniques pour leurs véhicules électriques, Mazda conserve un capot et un compartiment moteur de taille normale, ainsi qu’une calandre. La batterie pèse 300 kg et est totalement intégrée dans la structure de l’habitacle, autant pour des raisons dynamiques que des raisons de sécurité et de protection des passagers. A l’avant, les suspensions font appel à des classiques combinés McPherson tandis qu’à l’arrière ce sont des barres de torsion qui officient. Le comportement est plutôt homogène, avec une prise de roulis modérée (vu la taille et le poids de l’engin!) La pédale d’accélérateur permet une application linéaire de l’accélération et une transition imperceptible lors des passages de la marche avant à la marche arrière. Le levier de vitesses présente une forme ergonomique et se manipule comme celui d’une boîte automatique classique. Sécuriser le véhicule à l’arrêt impose de pousser le levier vers la gauche.

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Spacieux, surtout à l’avant, l’habitacle fait appel à du cuir vegan, des fils de tissu et des… bouteilles plastiques recyclées pour le haut des garnitures latérales.

La régénération ou le mode plus dynamique sont commandés par les palettes situées derrière le volant. Cinq possibilités sont offertes, dont la plus élevée permet de rouler avec une seule pédale, sans utiliser le frein. Seul bémol, il faut tout reprogrammer lors de chaque démarrage. Le freinage est hydraulique, à disques sur les quatre roues et le frein de parking est électrique. De plus, une fonction « auto hold » est activable facilement via le pavé de commande situé près du levier de vitesses. La MX30 est équipée d’un système G-Vectoring Control Plus qui utilise le groupe motopropulseur et optimise les transferts de charge entre essieux. Plutôt que le côté « coup de pied aux fesses » propres aux électriques, Mazda a pris le parti de miser sur la souplesse du moteur. Un bruit est même diffusé dans l’habitacle afin de donner une sensation de vitesse au conducteur et ses passagers. Avec ses 366 litres (ou 341 avec le système audio Bose), le coffre n’est pas particulièrement grand mais ses formes régulières sont assez logeables. Banquette rabattue, il atteint quasiment les 1200 litres.

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Un véritable cocon. A l’arrière les passagers disposent d’accoudoirs latéraux très confortables. Les vitres latérales sont un peu comme des hublots dans un avion de ligne et incitent à la relaxation pour un voyage au long cours. Dommage que l’autonomie limitée vienne gâcher les choses!

Sécurité optimale

Le MX30 est équipé en série de toute une panoplie de technologies baptisées « I-Activesense » : phares LED adaptatifs avec antibrouillards intégrés et lave-phares, régulateur de vitesse adaptatif avec fonction stop & go, gestion automatique des feux de route, reconnaissance active d’obstacles mobiles en marche avant et d’obstacles en marche arrière, avertisseur de franchissement de ligne, dispositif de maintien de file, reconnaissance des panneaux et affichage des limitations et de la vitesse sur le bas du pare-brise, aide au freinage intelligent (y compris en marche arrière!) avec prévention des accidents aux croisements, surveillance des angles morts et correction de trajectoire automatique… En outre, la structure du capot est prévue pour limiter les dommages aux piétons tandis que celle de la carrosserie est renforcée, afin de garantir la sécurité des passagers en l’absence de montants B.

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L’ergonomie est bien pensée, l’équipement pléthorique. Il y a même un indicateur de température de la batterie dans le combiné de bord. L’écran supérieur, bien lisible, n’est pas tactile. A la différence de l’inférieur, qui accueille les commandes de climatisation. Sièges et volant chauffants sont de série et bien agréables par temps froid!

Plutôt malin

Les portières s’ouvrent sur un intérieur harmonieux, propice à la détente et qui représente une réelle invitation au voyage. Le tableau de bord, aux lignes horizontales, crée une réelle impression d’espace et de sérénité. En partie centrale, un écran de 8,8’’ accueille radio, sources audio, navigation… et est commandé par une molette de bonne taille au centre de la console, ainsi qu’un plus petit bouton, à sa droite, pour le réglage du volume. Cet écran n’est pas tactile, à la différence de celui de 7,0’’ qui accueille les réglages de la climatisation en partie basse du tableau de bord. Des boutons classiques sont néanmoins disposés sur ses côtés. La console centrale est dite « flottante », avec une partie arrière où se trouvent deux prises USB et même une prise 220 V.  Si jamais il vous prenait l’envie de vous raser en roulant ou brancher un percolateur, une friteuse, on ne sait jamais… sans rire, ces prises centrales sont une excellente idée pour faciliter la vie des passagers. Les sièges (à réglages électriques côté conducteur) font appel à du cuir vegan et des fils de réemploi tandis que des bouteilles plastiques recyclées sont utilisées pour le haut des garnitures latérales. La console centrale et les poignées de portes sont recouvertes d’une couche de liège. Ecologique, ce matériau est également une allusion au tout premier métier de Toyo Kogyo, l’ancêtre de Mazda, qui en produisait et en vendait. L’ergonomie générale est excellente, toutes les commandes se trouvant là où on les attend. Le volant trois branches, chauffant, est agréable au toucher et les différents réglages permettent de le placer idéalement sans nuire à la visibilité du combiné de bord.

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La batterie est intégrée dans le soubassement du MX30. Cette position favorise la répartition des masses et lui confère un comportement digne d’une voiture thermique bien née.

J’aime bien

Sur route, le MX30 parvient assez bien à dissimuler sa taille et son poids de 1645 kg à vide. La direction est plutôt directe, l’assistance est bien dosée, on sent où se trouvent les grandes roues avant (18’’ sur notre modèle d’essai). Certes, ce n’est pas un MX5 mais le MX30 est facile à placer en courbe et se révèle très dynamique sur route. Par rapport à nombre de ses concurrents électriques, il procure des sensations dignes d’un véhicule à moteur thermique classique bien né et… le plaisir de conduire est bien réel. Une fois les portes arrière fermées, les passagers auront l’impression d’être dans un cocon, un peu comme dans un long courrier, la forme et la disposition des vitres latérales rappelant plus la carlingue d’un avion de ligne que celle d’une automobile. Les portes antagonistes sont une excellente idée pour des familles avec enfants en bas-âge qui doivent être placés dans un siège: non seulement l’accès est facile et aisé, sans montant central, mais, en plus, une fois refermées la sécurité est maximale puisqu’il faut absolument ouvrir une porte avant afin de les libérer. Par ailleurs soulignons l’excellence des caméras avant et arrière ainsi que la précision de la vision 360°, qui facilite grandement les manœuvres de parking. Coup de chapeau également pour le toit ouvrant, de série! On adore… Bien mieux qu’un simple toit panoramique, celui-ci se relève, s’ouvre et, surtout, rentre sous le pavillon plutôt que de remonter vers l’arrière, ce qui est affreux!  Beaucoup de constructeurs pourraient s’en inspirer.

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La console centrale est dite « flottante ». Bien située, elle permet de commander le système d’infotainement via la grande molette située à sa base. Bravo à Mazda de ne pas avoir cédé à la mode du « piano black » qui se révèle très salissant. La partie inférieure est recouverte de liège naturel, tout comme les poignées de portières. Outre l’aspect écologique, c’est aussi un rappel du premier métier de Toyo Kogyo, l’ancêtre de Mazda. Il y a 100 ans, la firme d’Hiroshima produisait et vendait ce matériau.

J’aime moins

Revers de la médaille du choix d’une petite batterie par Mazda, l’autonomie est très, trop limitée… Avec à peine 150 km, se rendre à la côte ou au Luxembourg depuis Liège ou Bruxelles représente un véritable défi! C’est d’autant plus difficile à admettre que le MX30 et son châssis sont bourrés de qualités: confortable, facile à conduire, agréable sur route avec un comportement très neutre qui donne envie de partir au long cours! Les commandes au volant sont un peu trop nombreuses et donc trop petites pour ne pas se tromper et, par exemple, couper le son alors que l’on voulait simplement diminuer ou augmenter le volume. Par ailleurs, les sièges avant manquent de soutien latéral. Montée en 7 X 18 avec pneus de 215/55, les roues ont l’air un peu perdues dans les passages de roues. Les portes antagonistes n’ont pas d’arrêt à mi-parcours. Il faudra donc s’en souvenir et faire attention aux voitures garées très près, aux murs ou lors de grand vent. La prise de recharge est placée dans l’aile arrière droite; avec certaines bornes, ce n’est pas toujours aussi aisé de brancher le câble que si elle se trouvait au centre de la calandre.

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La finition extérieure de notre voiture d’essai ne comporte pas moins de trois teintes ! Une délicate harmonie dans ce choix permet de conférer de la sportivité au MX30 tout en diminuant visuellement sa masse. Une vraie réussite typique de Mazda, ne rien faire comme les autres, on aime.

Pourquoi je l’achète

Pour l’expérience de conduite, très Mazda. Elle procure un vrai plaisir, très proche de celui d’une voiture thermique, avec des sensations directes trop peu courantes sur d’autres électriques. Certes, pas de coup de pied aux fesses mais bien une linéarité dans l’accélération, un comportement agile et équilibré, sûr en toutes circonstances. Par ailleurs, le côté décalé et le design jouent également en sa faveur, tout comme son niveau d’équipement et la qualité de sa finition.

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La prise de charge, située dans l’aile arrière droite permet également la charge rapide. C’est tant mieux eu égard à l’autonomie limitée du MX30… Toutefois, cet emplacement n’est pas toujours aussi pratique que sur certaines concurrentes, où il se situe au milieu de la calandre. Vu la taille du portillon, une goulotte de réservoir devrait bientôt permettre d’alimenter un range extender rotatif, bien dans la tradition maison !

Pourquoi je ne l’achète pas

Pour son autonomie, trop faible et le handicap que cela représente au quotidien. Selon le constructeur, l’autonomie est de 200 km en cycle mixte WLTP mais nous n’avons jamais pu dépasser les 150 km lors de notre essai. Certes, la saison, la luminosité réduite, la pluie… font que différents consommateurs électriques sont plus sollicités qu’au printemps ou en été mais lors de trajets en ville, avec la récupération maximale, nous n’avons quand même pas vu l’autonomie augmenter, tout au plus ne pas trop baisser. Mazda annonce une consommation d’électricité mixte de 19 kWh mais nous ne sommes jamais descendus sous les 21,5 au cours de notre essai. La recharge standard s’opère en courant alternatif et demande des heures! La charge rapide en courant continu nécessite moins de temps: les 80% sont atteints en 30- 40 minutes. Par contre, les derniers 20 % réclament un temps quasiment équivalent, bien que l’indication au tableau de bord soit différente, genre 10 minutes alors qu’il en faudra encore au moins le double. Le MX30 occupe un créneau unique sur le marché: celui d’un crossover cantonné à la ville, à cause de son autonomie malheureusement trop limitée. C’est bien là tout le paradoxe de l’engin, d’un côté il donne envie de rouler, conduire, prendre des virages en appui, d’apprécier sa position de conduite, son équipement, sa qualité de finition mais son autonomie limitée impose vite de trouver un Lidl avec une borne gratuite et libre!

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En résumé…

Le Mazda MX30 est un « crossover » très bien équipé, avec une finition d’excellente facture, confortable sur la route, agréable à conduire, aux tarifs étudiés mais dont l’autonomie limitée risque de rebuter nombre d’acheteurs potentiels. Ou, à tout le moins, de les faire patienter jusqu’à l’arrivée du MX30 équipé d’un moteur rotatif augmentant son autonomie. Selon Mazda, cette solution est plus écologique que d’augmenter la capacité de la batterie. Elle devrait en faire une proposition plus crédible en mettant beaucoup mieux ses qualités dynamiques en valeur.

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