Succès de foule incontestable, météo au beau fixe durant tout l’évènement, nombreuses bagarres sur la piste, on peut indubitablement tirer un bilan positif de cette 74e édition des 24 heures de Francorchamps, au moins du côté de SRO qui avait véritablement mis les petits plats dans les grands pour fêter dignement les 20 ans de la présence des GT. Du côté des infrastructures du circuit, nos louanges seront moins explicites.

Tout a débuté à la parade organisée le mercredi dans les rues de Spa. La soleil est au rendez-vous et les spectateurs ne s’y sont pas trompés ! Admirer gratuitement et de près les bolides qui vont s’affronter, dès le lendemain, sur le plus beau circuit du monde est une opportunité à ne pas manquer et de mémoire de spadois, on n’avait jamais vu autant de monde dans les rues de la petite cité thermale. Le ton est donné et le succès de foule ne va jamais se démentir durant les essais et la course. De quoi crédibiliser les 73.000 spectateurs annoncés par SRO à l’issue de l’épreuve.

C’est le jeudi, pour les qualifications à la Superpole que nous avons rejoint Francorchamps en nous installant immédiatement dans la nouvelle tribune. La vue y est décidément magnifique et l’on peut parler de réussite à l’égard de cette construction tant chaque place offre une visibilité impressionnante sur le Raidillon et la descente depuis la Source. Sur le coup de 20h55, les premières voitures montent en piste mais ce sont probablement les seconds couteaux au volant parce que le rythme n’est guère élevé. Découpée en quatre périodes, cette séance qualificative finit par provoquer la montée d’adrénaline attendue lorsque les top gun montent sur le ring et nous offrent des passages de l’Eau Rouge à couper le souffle. Les chronos tombent et l’on ressent une nouvelle fois cette excitation qui entretient inexorablement la flamme de notre passion.

Les étincelles des Mercedes-AMG GT, les vrombissements des moteurs et la nuit tombante offrent un moment de pur plaisir. Avec ma fille, on s’amuse à reconnaître les voiture à leur mélodie avant de les voir débouler devant nous. Une fois les 20 qualifiés pour le lendemain annoncés, nous quittons le circuit par les petites routes habituelles. Vendredi, SRO a organisé la première manche d’une course-démonstration avec quelques GT ayant marqué l’histoire de l’épreuve depuis 2002 et l’apparition des GT. De quoi revoir en piste des Viper GTS-R, des Maserati MC12 ou encore des Corvette C5-R, bref toutes ces GT ayant marqué l’épreuve ardennaise de leur empreinte.

Samedi, des occupations matinales nous empêchent de venir de bonne heure et il faudra attendre l’après-midi pour rejoindre le circuit. Bien nous en a pris si nous tenons compte des embouteillages vécus le matin suite au gros afflux de spectateurs. Décidément, Francorchamps n’évoluera jamais sur ce point mais en même temps, comment trouver une solution, les routes accédant au circuit n’étant pas extensibles… Et en effet, lorsque nous nous dirigeons vers notre parking, on nous annonce gentiment qu’il est complet et qu’il faut rejoindre une autre aire de stationnement. On n’y perd pas au change, celle-ci étant finalement plus proche de l’entrée du circuit. Impossible de ne pas foncer vers les paddocks pour y découvrir la nouvelle Ferrari 296 GT3. Une véritable bête de course conçue pour maximiser l’accès à sa mécanique et changer rapidement les éléments endommagés. Non loin de là, la Porsche 911 GT3 R 2022 fait figure de grand-mère avec son look inchangé depuis la nuit des temps.

Plus loin, les supercars des influenceurs mettent de la couleur dans un paddock où le public a répondu présent malgré les 35 euros supplémentaires exigés pour y accéder (à ajouter aux 45 euros de l’entrée générale). Un autre montant est exigé pour assister à la mise en grille mais là non plus, cela n’a pas refroidi un public qui ne cache pas son admiration pour Valentino Rossi, le héros de toute une communauté chamarrée venue se mêler aux amateurs de sport automobile.

Une bonne heure avant le départ, on décide d’y assister depuis la chicane où le peloton va débouler encore relativement compact pour y prendre le droite-gauche serré le plus proprement possible.

Tout le monde passe sans encombre et la course est lancée en évitant l’apparition du moindre drapeau jaune. Est-ce le retour des bacs à gravier ou le niveau des pilotes qui est particulièrement élevé cette année ? On est parti pour un véritable sprint où les amateurs ont de moins en moins leur place. Il suffit de voir comme Nigel Bailly galère à conserver un rythme suffisamment élevé et fini par se faire pousser dehors au virage du Campus.

En tête de la course, les Mercedes semblent sur un bon rythme et jouent au chat et à la souris avec les Ferrari Iron Lynx alors que les Porsche 911 tentent de s’accrocher au bon wagon et que les nouvelles BMW M4 restent en embuscade. C’est plus compliqué chez Audi tandis que Mc Laren et Lamborghini veulent y croire. Comme il fallait s’y attendre, les crevaisons sont nombreuses et c’est d’ailleurs l’Audi R8 LMS #26 de Gazeau qui en sera l’une des premières victimes, le jeune pilote ne pouvant éviter une sortie de route rédhibitoire dans Blanchimont.

Au gré des ravitaillements, la course se déroule sans trop de tracas jusqu’à la tombée de la nuit. Nous poursuivons notre tour du circuit en déplorant l’absence de la moindre sonorisation, les commentaires n’étant pas retransmis dans les haut-parleurs, la limite du wifi gratuit en dehors de la zone du paddock mais également des voitures et des semi-remorques stationnés le long du grillage entre la sortie du double gauche et la fin du pif-paf. Alors certes, il n’y a peut-être plus beaucoup de monde qui prend la peine d’effectuer le tour complet du circuit à pied mais il est néanmoins regrettable de priver ainsi l’accès aux spectateurs courageux à des points de vue légitimes.

Pendant ce temps, Audi continue de perdre des cartouches puisqu’après l’abandon de la #12 qui aurait pu également jouer un rôle dans le top10, la meilleure chance de l’équipe WRT , la #32 de Vanthoor-VanderLinde-Weerts subit une crevaison aux alentours de 23h. Sur le circuit, les DJ s’en donnent à cœur joie mais l’on s’échappe rapidement de l’esplanade du concert en constatant le comportement agressif de certaines personnes visiblement bien imbibées.

Fuyant la foule et le bruit, on se retrouve au cœur de la nuit à l’endroit des anciens gradins face aux tribunes « endurance » à la sortie de la Source, sur des talus, totalement seuls au monde à tenter de reconnaître les concurrents à la forme de leurs phares et au bruit de leur moteur.

Sur la piste, la bagarre se poursuit. C’est au tour de Porsche d’être frappée par la guigne lorsque la #54 doit se retirer, une crevaison entraînée par un contact ayant provoqué trop de dégâts. Mais la marque de Stuttgart ne sait pas qu’elle entre dans une période compliquée puisqu’elle va perdre deux éléments au cœur de la nuit (la #911 puis la #16), lors de deux grosses sorties dans Blanchimont dont la dernière entraînera l’interruption de la course.

Deux autres Porsche ne passent pas la nuit, la #221 étant trahie par son moteur alors que la #54 devait également être remisée dans son stand. Et l’on peut éprouver pas mal de regrets dans la clan Porsche lorsqu’on découvre que c’est la Porsche KCMG # de Vanthoor-Olsen-Tandy qui est en tête à la sortie de la nuit grâce à d’exceptionnels chronos signés durant la nuit. Pour l’anecdote, sachez que lors de son premier relais, Nick Tandy, qui s’était élancé depuis la 65e position, a gagné 40 places ! La suite leur sera moins favorable.

Elle devance alors la Ferrari #51, la BMW #98 et les Mercedes #88 et #55. Ne cherchez pas plus moins les vainqueurs, les 24 heures 2022 se disputeront entre ceux-là. Chez Audi, la catastrophe est complète lorsque les R8 WRT de Weerts et Muller s’accrochent suite à un violent coup de frein donné par le premier nommé.

Et chez Ferrari la #71 a grillé ses dernières cartouches suite à une pénalité pour une vitesse excessive sous FCY. Les dernières heures de course sont plus calmes, uniquement marquées par le retrait de la Porsche #74, percutée par un autre concurrent lors d’une relance de la course, alors qu’elle se battait encore avec les meilleurs ou encore la grosse sortie de la Mc Laren #188, poussée à haute vitesse, à l’entrée de Blanchimont, par la Mercedes-AMG GT #93.

Une voiture qui aurait largement mérité l’exclusion tant le comportement de son équipage aura été peu professionnel durant toute l’épreuve. De nombreuses poussettes (dont une entraînant l’AMG victorieuse en tête-à-queue le dimanche matin), des drapeaux bleus non-respectés et enfin, ce dernier fait d’arme qui aurait pu coûter cher à Ramos qui tapait violement le rail de face. Et comble de l’ironie, la voiture Sky grimpera sur le podium de sa catégorie en fin de course…

Enfin, les spectateurs placés dans la nouvelle tribune du Raidillon auront apprécié le mano à mano entre Thiim sur l’Aston Martin #95 et Gounon sur l’AMG #88 qui se battent alors pour la troisième place. La fin de course consiste en une bagarre de stratèges de laquelle sortira vainqueur l’équipe française Akkodis-ASP pour le plus grand plaisir de Jérôme Policand et de ses pilotes Marciello-Gounon-Juncadella. Et c’est même avec un doublé qu’AMG fête de brillante manière ses 55 ans puisque la #2 de l’équipe GetSpeed prend la deuxième place devant la Ferrari #71 de Fuoco-Rigon-Serra.

Mercedes renoue avec la victoire en terre ardennaise après son précédent succès de 2013 alors que l’équipage en pole position ne s’était plus imposé depuis 2014. Saluons encore la performance de la Ferrari des Iron Dames qui n’étaient pas trop contentes de leur situation à l’issue des essais qualificatifs mais qui ont profité d’une voiture rapide et confortable pour creuser un bel écart sur leurs concurrents en Gold Cup. Aux côtés de Rahel Frey et Michelle Gatting, la liégeoise Sarah Bovy a parfaitement tenu son rang de pilote Bronze, alors que la jeune Doriane Pin (18 ans) ne s’est pas laissé impressionner par le niveau très élevé du plateau.

En effet, avec de nombreux pilotes jeunes et particulièrement rapides, le niveau du GT3 n’a jamais été aussi élevé et comme les bolides sont de plus en plus résistants, c’est à un véritable sprint de 24 heures auquel on assiste désormais. La moindre approximation se paie cash et les erreurs sont nombreuses, impliquant très souvent le retrait définitif des voitures incriminées (43 classés sur 66 partants).

Dans ce contexte, on peut saluer la présence des 15 Belges au départ, qu’ils soient officiels ou non. Cette année, c’est Laurens Vanthoor qui termine meilleur belge avec sa 7e place finale mais Maxime Martin aurait pu y prétendre sans l’impétuosité de son équipier nordique… (Photos: SRO & site constructeurs)
