Tout le monde connait, dans son entourage, un indécrottable fan de BMW. Pour lui, la marque munichoise représente le sommet de la technologie, de la sportivité et de la qualité. Au vu de certains produits apparus ces derniers temps, très éloignés de l’esprit de la marque, nous les regardions désormais avec une certaine condescendance. Jusqu’à ce que nous goûtions à cet ovni de la production automobile appelé i8!
Quel engin! Nous l’avions admiré en photos avant de le découvrir sur les stands des salons de l’auto et puis la voilà, dans la rue, parmi tous ces déplaçoirs appelés monovolume, SUV ou encore Crossover. Au milieu de ces engins disgracieux se ressemblant tous, l’i8 prend toute sa dimension d’engin futuriste. Un peu comme si Pininfarina ou Bertone avaient commercialisé l’un de leur jolis prototypes en plein âge d’or de la carrosserie italienne. Ce qu’ils n’ont jamais eu les moyens de faire. De moyens, il n’en manque visiblement pas chez BMW qui ne cesse d’annoncer, trimestre après trimestre, des records de profitabilité. Alors quand il s’est agi de mettre en chantier la production, certes de limitée, de ce coupé hybride, le feu vert a vite été donné et cinq ans après son apparition au Salon de Francfort 2009, l’i8 était dans la rue.
Technologie de pointe
Sur le plan technique, la difficulté a consisté à l’alléger au maximum pour compenser le surpoids de sa chaîne de traction électrique, et ce, tout en maîtrisant son coût. Pour y parvenir, BMW a joué à fond la synergie avec le reste de sa gamme. Ce coupé reprend ainsi le procédé de fabrication largement automatisé de l’i3 pour sa coque en fibre de carbone, mais aussi son moteur électrique pour entraîner ses roues avant. La partie d’assemblage continue avec un train avant à double triangulation dérivant de celui d’une série 5, une crémaillère de direction à assistance électrique de X3 et un train arrière multibras inspiré de celui de l’actuelle série 3, sur lequel est installée une mécanique que l’on retrouve sous le capot de la dernière Mini. Car l’i8 est la première BMW animée par un moteur 3 cylindres. D’une cylindrée de seulement 1,5 litre, ce nouveau bloc développe, grâce à un turbocompresseur de taille généreuse, la bagatelle de 231 ch, soit la plus haute puissance spécifique des moteurs BMW actuels avec 154 ch/l. Ajoutez-y les 131 ch du moteur électrique entraînant les roues avant et vous obtenez un coupé 4 roues motrices disposant de 362 ch et 570 Nm pour déplacer moins de 1.490 kg. De quoi revendiquer un 0 à 100 km/h en 4″5, selon BMW. Pas mal! De plus, les quelque 100 kg de batterie lithium-ion logés dans le tunnel central de la coque en carbone confèrent à l’i8 une autonomie 100 % électrique de 35 km. Cette batterie peut être rechargée en moins de 2 heures sur le boîtier mural de 3,5 kW vendu par BMW ou en un peu plus de 3 heures sur une prise domestique de 220V 8A.
Finition light
Le premier contact avec l’i8 est déstabilisant. Elle semble tout droit sortie d’un film d’anticipation avec ses flancs sculptés en soufflerie – elle revendique un Cx de 0,26, record pour la catégorie – et ses immenses roues de 20 pouces très étroites afin de réduire sa résistance au roulement. Un caractère étrange accentué par la cinématique exotique de ses portières, à mi-chemin entre les “papillons” d’une Mercedes SLS AMG et les élytres d’une Lamborghini Aventador. Bref, impossible de passer inaperçu et les questions fusent aussi vite que les gsm pour photographier l’engin. Vous avez tout intérêt à bien connaître le sujet si vous voulez être en mesure de répondre à toutes les interrogations que ce coupé suscite.
L’accès à bord reste néanmoins plutôt aisé tandis que l’habitabilité profite de la largeur généreuse de la carrosserie (1,94 m). À l’avant en tout cas. Car les strapontins faisant office de places arrière sont à peine suffisants pour de jeunes enfants. Cet espace sera donc le plus souvent utilisé pour caser des bagages, un complément bienvenu aux 154 litres du minuscule coffre arrière. La position de conduite est inhabituellement basse pour une BMW, mais en tout point parfaite. Complétée par un système à visée tête haute, l’instrumentation principale change en fonction du mode de propulsion sélectionné, passant d’une partition classique avec compte-tours rouge en mode sport, à un traitement plus futuriste centré sur un indicateur de puissance bleu le reste du temps. L’ambiance est donc à la hauteur des formes uniques de l’i8.
La finition est correcte mais plus légère que celle des BMW traditionnelle. Un peu à l’image de ce que l’on trouve dans l’i3 où le constructeur justifie cela par la recherche du poids minimum mais aussi l’utilisation de matériaux recyclables. Reste qu’à bord d’une voiture affichée à 141.000€, on est en droit d’exiger mieux.
Une vraie BMW
Par défaut, l’i8 est une traction avant électrique à basse vitesse. Deux rapports de transmission sont alors disponibles. Le rapport court est exclusivement utilisé en Emode 100 % électrique pour autoriser de meilleures accélérations et reprises, mais sa plage d’utilisation est limitée à 120 km/h. Dans ce cas, le 3 cylindres essence n’est démarré qu’en situation d’urgence, lorsque le conducteur écrase l’accélérateur (kick down). Mais l’i8 se montre alors très convaincante et permet d’envisager sereinement une utilisation zéro émission, et donc zéro consommation d’essence au quotidien. Nous avons ainsi effectué un trajet périurbain en mode full électrique sans jamais avoir gêné la circulation par des comportements artificiels. Et en respectant les limitations de vitesse comme la majorité des usagers, l’autonomie annoncée d’une trentaine de kilomètres est absolument réaliste. Déjà rien que pour cet usage, la BMW i8 est particulièrement aboutie si nous pensons à des produits japonais, récemment essayés, qui ne permettent toujours pas de rouler normalement en réussissant à conserver le mode 100% électrique.
Le rapport long est utilisé en permanence en mode hybride afin de permettre au moteur électrique de participer à l’effort de propulsion jusqu’à la vitesse de pointe de 250 km/h de l’i8. Mais là où ce coupé BMW est très fort, c’est lorsque vous passez en mode sport. La direction se fait plus lourde, l’amortissement est durci pour augmenter l’agilité du châssis et, surtout, la logique du système de propulsion est inversée. Ce n’est plus au moteur essence d’épauler le moteur électrique lorsque le besoin s’en fait sentir, mais au moteur électrique d’abonder de ses 131 ch les 231 ch du 3 cylindres constamment sollicités. La réponse à l’accélérateur est aussi radicalement différente. Alors que l’i8 vous incitait à une conduite apaisée et coulée en mode hybride confort, elle bondit à chaque pression sur l’accélérateur en mode sport, accompagnée d’un jappement rageur du 3 cylindres BMW évoquant parfois celui d’un Flat-6 Porsche, si pas d’un V8 Chevrolet!
Ambiance sportive
Bref, on est alors loin du côté 100% vert de l’auto et le plaisir de conduire redevient prioritaire. Comme dans toute autre BMW, vous pouvez déconnecter les aides à la conduite et là, cela devient franchement marrant. En jouant avec les palettes et en choisissant le bon rapport, vous pouvez facilement entretenir de belles dérives, bien aidés par les pneus étroits, des Bridgestone Potenza S001 en 215/45 R20 à l’avant, 245/40 R20 à l’arrière. Une monte critiquée mais justifiée et totalement dans l’esprit de l’engin. Pour notre part, c’est dans les longues courbes rapides et régulières que nous avons ressenti un léger flottement peu rassurant. Du côté des consommations, vous pouvez tabler sur des chiffres tournant autour des 9 l/100 km. Mais à condition de ne pas vouloir faire chanter le petit trois pattes à la moindre occasion!
Finalement, cette BMW i8 affichée à 141.000€ représenterait presque une bonne affaire. Parce que pour ce prix-là, vous roulez dans un véhicule à la pointe de la technologie, qui suscite de nombreuses marques de sympathie et qui est, en plus, particulièrement bien équipé. Vous bénéficiez en effet de l’alarme, des sièges électriques et chauffants, du Park Distance Control, du Driving Assistant, le Head-Up display, le Harmann-Kardon sound system ou encore la téléphonie confort avec connectivité smartphone étendue. Sachez encore que le modèle que nous avons eu en prêt s’équipait des phares laser à 9.660€ mais notre essai nocturne ne nous a pas réellement fait comprendre l’intérêt d’une telle dépense. (Photos: http://www.alexisbernard.be/)
Caractéristiques techniques BMW i8
Moteurs 3 en ligne turbo central, 1 électrique avant
Cylindrée 1499 cc
Puissance combinée maxi 362 ch à 5800 t/min
Couple cumulé maxi 570 Nm à 3700 t/min
Transmission aux 4 roues; automatique 6 rapports
Suspension av./arr. Ressorts hélicoïdaux, doubles triangulation/essieu multibras
Freins av./arr. disq. ventilés (340 mm)
Poids à vide 1485 kg
Coffre 154 litres
Performances Top: 250 km/h. 0-100 km/h: 4″5.
Consommat°: moy. du test 10,0 l/100 km. Réservoir: 42 l
Emissions 49 g de CO2/km
Prix de base 141.000 €